Hier soir, j’ai vu un homme s’enfoncer dans le trottoir
Cette histoire est basée sur des faits réels, l’inconnu existe, le trottoir aussi. Seul le cri de la libellule est une supputation. Mais je ne vois pas pourquoi les libellules ne crieraient pas. Même en silence. Les cris silencieux sont les plus intéressants et le port de la casquette ne fait qu’en renforcer l’intensité. Je dis ça pour pousser les libellule à porter la casquette. Pas pour que vous vous mettiez à crier.
Sérieux.
Entre chien et loup, un individu s’est lentement fondu dans le trottoir, à côté de chez moi. Mon attention a tout d’abord été attirée par le fait qu’il n’avait pas de pieds. C’est que la fusion avant déjà commencé, mais ça, je ne l’ai découvert qu’en m’approchant un peu.
Donc, voilà le topo : un homme jeune, sans pieds, s’enfonce lentement, sous mes yeux ébaubis, dans une portion de trottoir (précisément la portion entre boulangerie et pharmacie).
La scène s’est déroulée très vite, le temps d’un passage du rouge au vert.
Personnellement, l’idée d’un monde extra-terrestre m’a toujours semblée attirante. J’ai même l’intime conviction d’être l’élue, celle avec qui ils vont tenter de communiquer en premier. Donc en voir la manifestation m’a paru tout à fait normal. Attendu, même pas peur.
(Oui, il y a des gens qui trouvent normal de voir un individu sans pieds fondre dans le bitume.)
Quand seul son buste surplombait le niveau de la rue, j’ai dû manœuvrer pour laisser passer les voitures qui préfèrent circuler au vert (il y en a encore un peu).
Ca a pris quelques secondes, mais quand j’ai de nouveau tourné la tête, seule la sienne (de tête) dépassait du sol. Je me suis dit qu’il fallait à tout prix tenter d’entrer en communication avec lui avant sa complète disparition. Au moins pour le prévenir que le trottoir est parfois sale et que s’il voulait se fondre dans le décor, un arbre ou un mural street-art étaient plus adaptés. Avec une préférence pour le mural.
N’écoutant que mon courage, je suis donc descendue de mon fidèle destrier mais le temps de traverser, la tête s’était définitivement mêlée au bitume.
Merde. Le processus de fusion avait pris fin.
Dans une tentative désespérée d’établir le contact, j’ai poussé un cri de libellule et entamé une danse sioux de la paix, tout en agitant dans ce qui avait été sa direction mon i-phone tout neuf, comme preuve de la grande avancée technologique de cette planète. Devant tant de bonne volonté, il ne pouvait que revenir vers moi.
Las. L’inconnu du trottoir avait terminé sa mutation et je ne devais plus le revoir.
C’est pourquoi je me suis mise à peindre la parcelle de sol qui avait été en son contact. S’il s’y était fondu, autant lui rendre un hommage vibrant.
Voilà comment actualiser le mythe du prince charmant : la bouche du crapaud correspond à l’endroit par où le mystérieux inconnu a disparu.
Et rigolez pas, c’est pas plus con que pokémon GO !…
Sinon, l’artiste qui décore les trottoirs est par là : http://www.julianbeever.net/
Publié le 10 septembre 2016, dans Extrapolations, et tagué extra-terrestre, julian beever, street-art, trottoir. Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.
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